Page 336 - Bulbul Hezar
P. 336
attention, elle s’apercevra qu’il a le chant éclatant au-dessus de
celui de tous les autres oiseaux, même du rossignol, qui n’en
approche que de bien loin. »
Le sultan entra dans le salon, et comme l’oiseau continuait son
chant : « Mon esclave, dit la princesse en élevant la voix, voilà
le sultan, faites-lui votre compliment.» L’oiseau cessa de
chanter dans le moment, et tous les autres oiseaux cessèrent de
même. «Que le sultan, dit-il, soit le très-bienvenu, que Dieu le
comble de prospérités et prolonge le nombre de ses années ! »
Comme le repas était servi sur le sofa près de la fenêtre où était
l’oiseau, le sultan, en se mettant à table : « Oiseau, dit-il, je te
remercie de ton compliment, et je suis ravi de voir en toi le
sultan et le roi des oiseaux. »
Le sultan, qui vit devant lui le plat de concombres, qu’il croyait
farcis à l’ordinaire, y porta d’abord la main, et son étonnement
fut extrême de les voir farcis de perles. « Quelle nouveauté !
dit-il. À quel dessein une farce de perles ? Les perles ne se
mangent pas. » Il regardait déjà les deux princes et la princesse
pour leur demander ce que cela signifiait, mais l’oiseau
l’interrompit : « Sire, dit-il, Votre Majesté peut-elle être dans
un étonnement si grand d’une farce de perles qu’elle voit de ses
yeux, elle qui a cru si facilement que la sultane son épouse était
_
336