Page 338 - Bulbul Hezar
P. 338
accouchée d’un chien, d’un chat, d’un morceau de bois ? – Je
l’ai cru, repartit le sultan, parce que les sages-femmes me l’ont
assuré. – Ces sages-femmes, Sire, repartit l’oiseau, étaient
sœurs de la sultane, mais sœurs jalouses du bonheur dont vous
l’aviez honorée préférablement à elles ; et, pour satisfaire leur
rage, elles ont abusé de la facilité de Votre Majesté ; elles
avoueront leur crime si vous les faites interroger. Les deux
frères et leur sœur que vous voyez sont vos enfants, qu’elles ont
exposés, mais qui ont été recueillis par l’intendant de vos
jardins, et nourris et élevés par ses soins. »
Le discours de l’oiseau éclaira l’entendement du sultan en un
instant. « Oiseau, s’écria-t-il, je n’ai pas de peine à ajouter foi à
la vérité que tu me découvres et que tu m’annonces.
L’inclination qui m’entraînait de leur côté et la tendresse que je
sentais déjà pour eux ne me disaient que trop qu’ils étaient de
mon sang. Venez donc, mes enfants, venez, ma fille, que je vous
embrasse et que je vous donne les premières marques de mon
amour et de ma tendresse de père. » Il se leva, et après avoir
embrassé les deux princes et la princesse l’un après l’autre en
mêlant ses larmes avec les leurs : « Ce n’est pas assez, mes
enfants, dit-il, il faut aussi que vous vous embrassiez les uns les
autres, non comme enfants de l’intendant de mes _____
338