Page 308 - Bulbul Hezar
P. 308

étaient convenus avec elle, de la demande, de la réponse, et de
             ce qu’elle lui avait opposé au sujet du mets de concombres

             farcis de perles, et du moyen qu’il lui avait donné d’en avoir, en
             lui enseignant et indiquant le lieu où elle venait de trouver le
             coffret. Les princes et la princesse firent plusieurs
             raisonnements pour pénétrer à quel dessein l’oiseau voulait
             qu’on préparât un mets de la sorte pour le sultan, jusqu’à faire
             trouver les moyens d’y réussir. Mais enfin, après avoir bien
             discouru pour et contre sur cette matière, ils conclurent qu’ils

             n’y comprenaient rien, et cependant qu’il fallait exécuter le
             conseil de point en point, et n’y pas manquer.
             [a capo]En rentrant dans la maison, la princesse fit appeler le
             chef de cuisine, qui vint la trouver dans son appartement. Après
             qu’elle lui eut ordonné le repas pour régaler le sultan de la
             manière qu’elle l’entendait : « Outre tout ce que je viens de
             vous dire, ajouta-t-elle, il faut que vous me fassiez un mets
             exprès pour la bouche du sultan, et ainsi, que personne que
             vous n’y mette la main. Ce mets est un plat de concombres

             farcis, dont vous ferez la farce des perles que voici. » Et en
             même temps elle ouvrit le coffret et lui montra les perles.
             Le chef de cuisine, qui jamais n’avait entendu parler d’une farce
             pareille, recula deux pas en arrière, avec un visage qui marquait



                                                     306
   303   304   305   306   307   308   309   310   311   312   313