Page 274 - Bulbul Hezar
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et vous avez bien jugé que, si vous aviez commencé à le voir,
vous seriez obligés insensiblement à m’abandonner, pour vous
donner tout à lui. Mais croyez-vous qu’il soit aisé de refuser
absolument au sultan ce qu’il souhaite avec tant
d’empressement, comme il le paraît ? Les souhaits des sultans
sont des volontés auxquelles il est dangereux de résister. Ainsi,
quand en suivant mon inclination, je vous dissuaderais d’avoir
pour lui la complaisance qu’il exige de vous, je ne ferais que
vous exposer à son ressentiment, et que risquer d’être
malheureuse avec vous. Vous voyez quel est mon sentiment ;
avant néanmoins de rien conclure, consultons l’oiseau qui parle,
et voyons ce qu’il nous conseillera : il est pénétrant et
prévoyant, et il nous a promis son secours dans les difficultés
qui nous embarrasseraient. »
La princesse Parizade se fit apporter la cage, et, après qu’elle
eut proposé la difficulté à l’oiseau, en présence des princes, elle
lui demanda ce qu’il était à propos qu’ils fissent dans cette
perplexité. L’oiseau répondit : « Il faut que les princes vos
frères correspondent à la volonté du sultan, et même qu’à leur
tour ils l’invitent à venir voir votre maison.
– Mais, oiseau, reprit la princesse, nous nous aimons, mes
frères et moi, d’une amitié sans égale ; cette amitié ne souffrira-
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