Page 150 - Bulbul Hezar
P. 150

y avait de longues années, et s’était négligé pour s’attacher à
             Dieu uniquement, de manière qu’à la fin il était fait comme

             nous venons de le voir.
             Le prince Bahman, qui depuis le matin avait été attentif à
             observer s’il rencontrerait quelqu’un dont il pût s’informer du
             lieu où son dessein était de se rendre, s’arrêta quand il fut
             arrivé près du derviche, comme étant le premier qu’il
             rencontrait, et mit pied à terre, pour se conformer à ce que la
             dévote avait marqué à la princesse Parizade. En tenant son

             cheval par la bride, il s’avança jusqu’au derviche, et, en le
             saluant: « Bon père, dit-il, Dieu prolonge vos jours, et vous
             accorde l’accomplissement de vos désirs! »
             Le derviche répondit au salut du prince, mais si peu
             intelligiblement, qu’il n’en comprit pas un mot. Comme le
             prince Bahman vit que l’empêchement venait de ce que la
             moustache couvrait la bouche du derviche, et qu’il ne voulait
             pas passer outre sans prendre de lui l’instruction dont il avait
             besoin, il prit des ciseaux dont il était muni, et après avoir

             attaché son cheval à une branche de l’arbre, il lui dit: « Bon
             derviche, j’ai à vous parler, mais votre moustache empêche que
             je ne vous entende. Vous voudrez bien, et je vous prie de me
             laisser faire, que je vous l’accommode, avec vos sourcils, qui
             ___

                                                     150
   145   146   147   148   149   150   151   152   153   154   155