Page 168 - Bulbul Hezar
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me rendant à leurs instances, et je puis vous assurer qu’ils y ont
tous échoué et que je n’en ai pas vu revenir un seul. Pour peu
donc que vous aimiez la vie et que vous vouliez suivre mon
conseil, vous n’irez pas plus loin et vous retournerez chez
vous.»
Le prince Bahman persista dans sa résolution. « Je veux croire,
dit-il au derviche, que votre conseil est sincère, et je vous suis
obligé de la marque d’amitié que vous me donnez. Mais, quel
que soit le danger dont vous me parlez, rien n’est capable de
me faire changer de dessein. Quiconque m’attaquera, j’ai de
bonnes armes, et il ne sera ni plus vaillant ni plus brave que
moi. – Et si ceux qui vous attaqueront, remontra le derviche,
ne se font pas voir (car ils sont plusieurs), comment vous
défendrez-vous contre des gens qui sont invisibles? – Il
n’importe, repartit le prince; quoi que vous puissiez dire, vous
ne me persuaderez pas de rien faire contre mon devoir. Puisque
vous savez le chemin que je vous demande, je vous conjure
encore une fois de me l’enseigner, et de ne pas me refuser cette
grâce. » Quand le derviche vit qu’il ne pouvait rien gagner sur
l’esprit du prince Bahman, et qu’il était opiniâtre dans la
résolution de continuer son voyage nonobstant les avis
salutaires qu’il lui donnait, il mit la main dans un sac ___
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